La réglementation communautaire est obsolète : elle doit être réformée d’urgence pour protéger la santé et l’environnement des Européens. C’est le sens d’une vigoureuse et alarmante motion adressée, vendredi 24 mai, par une centaine de chercheurs internationaux de haut niveau à la Commission européenne. Issue de communautés scientifiques – toxicologie, endocrinologie, biologie du développement… – peu portées à s’adresser directement aux responsables politiques, l’initiative est sans précédent. Par Stéphane Foucart Le Monde 25.05.2013.
Baptisé « Déclaration de Berlaymont sur les perturbateurs endocriniens », le texte presse Bruxelles de tenir compte des résultats scientifiques qui s’accumulent depuis de nombreuses années sur les effets délétères de plusieurs centaines de substances chimiques (solvants, isolants électriques, bisphénols, retardateurs de flamme bromés, pesticides…), qui perturbent le système hormonal. Certaines, ubiquitaires, sont présentes à des niveaux mesurables dans l’ensemble de la population.
Les signataires – tous professeurs d’université ou chercheurs au sein d’organismes publics de recherche – se disent « inquiets » de voir « la prévalence de maladies liées au système hormonal atteindre des sommets inédits (…) dans l’Union européenne et au niveau mondial ». Parmi elles, les auteurs citent plusieurs cancers (sein, prostate, testicule, endomètre [paroi qui tapisse l’utérus], ovaire, thyroïde), les troubles de la fertilité, des maladies neuro-comportementales (troubles de l’attention, hyperactivité…), l’obésité et le diabète de type 2. Des pathologies observées chez les animaux de laboratoire exposés aux molécules en question.
Le terme de perturbateurs endocriniens chimiques ( Endocrine disrupting chemicals, en anglais) apparaît dans la littérature scientifique en 1993, dans un article de trois biologistes (Theo Kolborn, Frederick vom Saal et Ana Soto) publié par la revue Environmental Health Perspectives. Cet article séminal a été, depuis, cité environ deux mille fois dans la littérature scientifique. Pourtant, près de deux décennies plus tard, la définition précise de ces perturbateurs n’est toujours pas arrêtée.
Les plus célèbres d’entre eux sont le bisphénol A (BPA), certains phtalates, certaines dioxines, le célèbre insecticide DDT, les polychlorobiphényles (PCB), ou encore le pesticide chlordécone – utilisé dans les Antilles françaises jusque dans les années 1990. Au total, plusieurs centaines de molécules de synthèse en circulation sont considérées dans la littérature savante comme perturbateurs endocriniens avérés ou suspectés.
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