La publication récente du rapport « the world nuclear industry status report 2016 » a été l’occasion d’un débat Médiapart en vidéo mené par Jade Lindgaard avec Mycle Schneider, consultant international et coordinateur du rapport, et Juan C. Rodriguez, analyste financier, sur les bouleversements économiques et financiers à l’origine du déclin irréversible du nucléaire. Mediapart avait également invité un.e représentant.e de la direction d’EDF, ainsi que du ministère de la transition écologique. Tous deux ont décliné. Info CANO 26 septembre 2017
On peut écouter ce débat très instructif https://www.youtube.com/watch?v=7JNUyBNToCk
Ci-dessous un commentaire pour faire le lien avec la situation particulière de notre pays.
Le nucléaire mondial en déclin est en crise, ainsi : La part du nucléaire dans la production mondiale d’électricité est passée de 17,6% en1995 à 10,7% en 2015 et, si on parle d’énergie totale utilisée dans le monde : 2% vient du nucléaire 13% des renouvelables. Le cours des actions des grands groupes s’effondrent. Westinghouse a déposé son bilan et mis Toshiba en difficulté, ils abandonnent leurs 2 centrales en construction aux Etats Unis. Quant à EDF et Areva la valeur dérisoire de leur cours en dit long ; EDF passe de 86€ à 11€ – et Areva de 81 à 4€…. Le nombre de réacteurs en fonctionnement diminue en 15 ans de 438 à 402 et leur âge moyen augmente (29 ans) du fait de la diminution de nouveaux projets. 58 réacteurs sont encore en construction (dont 21 en Chine), mais il n’y en a eu que 8 mis en chantier en 2016 et aucun cette année. Le temps moyen de construction est d’une dizaine d’années, mais certains d’entre eux le sont depuis plus longtemps. Le cas de la Chine est particulier, le seul pays à développer intensément le nucléaire, mais à développer encore plus les renouvelables qui dominent le nucléaire en production. La Corée du sud ferme définitivement les centrales qui atteignent 40 ans de fonctionnement, et arrête 2 chantiers de réacteurs en cours. En Europe occidentale, la Suisse interdit tout nouveau chantier rejoignant ainsi ses voisins, seule la France….
La France s’obstine. Elle dégage 8 milliards pour sauver EDF et AREVA de la faillite. Elle poursuit la construction de l’EPR malgré les malfaçons et défauts de fabrication d’Areva au Creusot. En particulier l’excès de carbone dans l’acier de parties essentielles du cœur constitue une menace de fragilisation et un risque accru. Elle veut enfouir les déchets à Bure pour des centaines de milliers d’années, alors que notre civilisation n’a que quelques milliers d’années ! Elle avance sur les projets du CEA: Astrid à Marcoule et Iter à Cadarache. Elle essaye de placer des EPR en Angleterre et en Inde à des prix de revient concurrencés par les renouvelables. Elle est incapable de mettre l’argent nécessaire pour « rajeunir » et sécuriser les 58 réacteurs existants et veut les prolonger ne serait-ce que pour repousser le coût exorbitant de leur démantèlement.
Elle refuse de signer tout traité d’élimination d’armement nucléaire.
Elle réprime les opposants. Chaque manifestation donne lieu à un déploiement impressionnant de policiers utilisant des grenades qui tuent (Vital Michalon à Malville) ou qui blessent gravement (Robin Pagès dernièrement à Bure). Elle s’introduit chez les opposants pour confisquer leurs ordinateurs et anéantir leur travail. Areva lance des plaintes en diffamation et des procès pour user les militants et les décourager (Stephane Lhomme, Coordination antinucléaire sud-est). Elle prend ses dispositions pour gérer les conséquences d’un accident de façon non pas à mettre vraiment à l’abri les populations menacées, mais à sauver l’industrie et l’armement atomique, comme cela se passe en Biélorussie et au Japon (programme Ethos, et pour cela la contamination est niée comme la dangerosité de la radioactivité, les responsables du lobby français jouant un grand rôle dans ce véritable crime contre l’humanité).
Depuis le début du nucléaire il n’y a pas eu de débat démocratique et les contestations, même importantes, sont systématiquement réprimées.
Faudra-t-il attendre la catastrophe qui nous menace pour arrêter cette folie?