Pour les militants écologiques, le Gouvernement Ayrault 1 n’inspire pas à sabler bruyamment le champagne. Même Bio. Un mousseux sans sulfites suffira. Le Monde 17 mai 2012 par Guillaume Malaurie
D’abord parce que le dossier forcément transversal de l’ écologie ne redevient pas, comme certains feignaient de le croire, un Giga Ministère d’Etat agrégeant le Développement Durable, l’Equipement, l’Aménagement du territoire, les Transports, la Pêche, l’Energie et le Logement ainsi que ce fut le cas avec Alain Juppé puis Jean Louis Borloo. Lorsque le député UMP Bertrand Pancher, Co-rapporteur de Grenelle I et II, parle de « dislocation du Grand Mininstère de l’écologie », il y va certes un peu fort, mais sur le plan de la culture administrative, il y a du vrai.
Nicole Bricq n’est pas le poids lourd espéré par les ONG
Plus ennuyeux pour les ONG : la nouvelle tenante du titre, Nicole Bricq, n’est pas le poids lourd espéré du PS qui peut donner le change à Bercy ou à la citadelle de l’Agriculture. Les deux administrations les plus rétives aux sirènes vertes l’une et l’autre tenues par des proches de Hollande.
Ceux qui, à Europe Ecologie, faisaient récemment la danse du ventre pour obtenir coûte que coûte des postes en ne posant pas la moindre condition et en annonçant un quinquennat forcément centré sur la transition écologique en sont donc pour leur frais. Ils sont renvoyés brutalement à la réalité électorale : le minima minimorum d’ Eva Joly aux Présidentielles.
C’était donc prévisible : ni Hollande ni Ayrault n’ont voulu d’un dispositif qui laisse entendre que la transition écologique et énergétique puisse être une des leviers déçisifs de la stratégie gouvernementale. C’est comme ça et pas autrement : le « social » avec Michel Sapin et l’Education avec Vincent Peillon restent les deux étendards classiques d’un gouvernement PS. Pour la doctrine « social écologique », chère à Martine Aubry et votée à l’unanimité par les socialistes d’avant Hollande, on repassera.
Reste que l’avenir n’est pas insulté. Loin de là.
Le levier stratégique de l’énergie
D’abord, parce que Nicole Bricq est une coriace qui sait compter et défendre ses dossiers. Qu’elle soit novice sur ces thématiques – encore qu’elle fut en 1992 conseillère technique au cabinet de Ségolène Royal alors Secrétaire d’Etat à l’Environnement-, n’est pas bien grave. L’écologie, avec ses crises sanitaires, son réchauffement, la hausse de l’essence et de l’électricité, viendra à elle comme elle s’est imposée à cet autre débutant : Jean Louis Borloo.
Il faut d’ailleurs souligner que Nicole Bricq réalise une excellente opération en récupérant la compétence sur l’énergie et le grand débat de la rentrée qui va avec. Dossier ultra sensible qui était, depuis le départ de Borloo, partagé, mieux vaudrait dire disputé, entre Nathalie Kosciusko-Morizet et Eric Besson. Lorsqu’il s’agira de trancher sur les gaz de schiste, les énergies alternatives ou sur telle ou telle centrale nucléaire, ça peut-être appréciable.
Derniers points : cette charentaise fille d’un exploitant agricole trouvera peut-être mieux que Dominique Voynet dans le passé, les mots justes pour s’adresser au monde rural. Et il est plutôt positif que les socoalistes se décident enfin à prendre par les cornes la question environnementale plutôt que de la sous-traiter à leurs alliés.
L’attelage avec Cécile Duflot
Enfin, Nicole Bricq devrait pouvoir compter sur le second pôle « écolo » qui ne dit pas son nom du Gouvernement Ayrault. Comprenez le Ministère de Cécile Duflot taillé, c’est assez sketch, dans celui de l’écologie et qui récupère donc l’Aménagement du territoire et surtout le Logement.
A condition bien sûr que les deux Ministres s’entendent. ce qui n’est jamais gagné à l’avance.
Le Logement, c’est en effet le seul engagement vert tangible et dont les objectifs soient chiffrés de François Hollande : 600 000 logements à réhabiliter thermiquement par an. Prométhéen par les temps qui courent.
En principe, Cécile Duflot, surnommé parfois Vuvuzella, devrait rappeler au claironses promesses au Président et Nicole Bricq devrait défendre en deuxième rideau les moyens budgétaires et techniques ( l’Agence de l’Environnemt et de la maîtrise de l’énergie ) de cette réforme déçisive. En sachant tout de même que le concept d' »économie d’énergies » est un concept trompeur. Peu rentable électoralement. D’abord ça coûte trés cher. C’est ensuite seulement, soit bien aprés le quinquennat, que ça rapporte.
La Coopération de papa eco-revisitée.
Ajoutons enfin que le très compétent Pascal Canfin, Europe Ecologie lui aussi, est chargé du Développement, c‘est à dire de la coopération avec les pays du sud qu’il aura sans doute à cœur d’émanciper d’une gestion à l’ancienne.
Le « verdissement » de l’aide sera sans doute son souci majeur. Il sera d’ailleurs immédiatement sur la brèche avec le rendez-vous international de Rio+20. Nul doute que l’ex député européen s’insipera du rapport présenté hier à Bruxelles par la Commission Européenne sur le développement et qui s’intitule : « Faire face à la rareté ». Rareté de l’eau, de la terre et de l’énergie.
Au total, une écologie en kit mais dont les … briques, sans jeu de mots, mises bout à bout, peuvent permettre de renforcer les murs d’une action publique qui ne repose pas sur rien. Les fondations du Grenelle de l’Environnement sont là. Et on est tenté de dire : heureusement ! C’est ce qui fait toute la diffrence avec l’expérience brinquebalante du Ministère de l’écologie version Voynet dans l’avant dernier gouvernement de Gauche. Celui de Lionel Jospin.
Guillaume Malaurie