Bonnes nouvelles environnementales. « Il y a urgence : on retrouve des pesticides dans les rivières, dans les nappes souterraines et dans notre nourriture ». C’est par ces mots que Denis Baupin, vice-président de l’Assemblée Nationale, a ouvert la conférence de presse organisée le 27 mars dernier pour présenter le comité des élus en faveur des alternatives aux pesticides. Leur objectif : faire voter des lois qui favorisent la santé humaine et la protection de l’environnement en diminuant l’usage des pesticides et en promouvant le rapport sénatorial « Pesticides, vers le risque zéro ». Source Reporterre vendredi 10 mai 2013
En effet, comme l’a rappelé Sophie Primas, sénateur UMP, « les pesticides ne sont pas utilisés que par les agriculteurs. Des industriels, des entreprises comme la SNCF en utilisent aussi, ainsi que des particuliers dans leur jardin. Or les risques dus aux pesticides ont longtemps été sous-estimés. » Ces risques concernent différentes pathologies, allant de la baisse de la fertilité masculine (1), aux tumeurs cérébrales (2) en passant par des troubles du système endocrinien (1), régulateur de beaucoup de fonctions dans notre corps (3).
Pour permettre de réduire l’utilisation de ces produits, également appelés produits phytosanitaires ou phytopharmaceutiques, plusieurs pistes ont été évoquées par les élus :
- – Informer les consommateurs. Il existe déjà une prise de conscience au sein de la population, mais tous les députés et sénateurs présents étaient d’accord pour dire qu’il existe des alternatives aux pesticides – et c’est une bonne nouvelle – mais qu’elles sont moins connues. Les caisses de santé pourraient être partenaires, notamment, du relais de l’information aussi bien sur les risques que sur les alternatives et les bonnes pratiques, selon Brigitte Allain, députée Vert.
- – Consommer plus de produits biologiques, français notamment. Chantal Jouanno, sénateur UDI, a rappelé que le prix des produits biologiques n’est pas forcément plus cher que celui des produits élaborés et qu’en achetant des aliments de base comme le pain, le lait ou des fruits et légumes, le consommateur y gagne le plus souvent plutôt qu’en achetant un plat préparé. Elle a également indiqué qu’en favorisant l’agriculture biologique et la diminution des pesticides par les autres utilisateurs, on traitait le problème en amont et non plus en bout de chaîne. L’idéal serait que la commission sanitaire du Sénat prenne en compte l’aspect préventif des perturbateurs endocriniens, sur lesquels elle travaille, et non plus seulement les problèmes une fois les maladies déclarées.
- – Protéger les zones de captage des eaux (4)de façon systématique. « On savait qu’on ne respecterait pas les normes européennes » a ajouté Chantal Jouanno.
- – Proposer l’interdiction de la vente au détail des produits phytosanitaires aux non-professionnels, c’est-à-dire les particuliers (Joël Labbé, sénateur écologiste).
- – Harmoniser la législation européenne sur les molécules chimiques autorisées par pays, (proposition de Joël Labbé) car une molécule interdite en France peut revenir sur le marché alimentaire de l’hexagone via les importations.
- – Mieux intégrer l’agroécologie et former les producteurs sur le terrain, développer les formations d’agriculture biologique (Brigitte Allain).
- – Copier l’initiative du Danemark qui taxe les produits phytosanitaires.
- – Demander l’obligation de la déclaration des adjuvants dans les préparations de pesticides (actuellement non cités dans la composition des produits), comme le benzène (retiré en agriculture depuis les années 70 mais présent ailleurs), produit dont les effets sont reconnus en maladie professionnelle aujourd’hui pour les agriculteurs.
- – Mieux faire connaître les « pnpp » (préparations naturelles peu préoccupantes).
- – Mieux mesurer l’effet « cocktail » c’est-à-dire l’absorption de petites doses de plusieurs pesticides et leur effet cumulé sur notre santé (Chantal Jouanno).
A très court terme, la loi d’avenir agricole qui sera débattue cette année traitera des pesticides et devrait proposer des actions concrètes pour en diminuer l’utilisation.
Après l’intervention des élus, ainsi que d’un médecin porte-parole d’un collectif de 120 médecins demandant la réduction de 50% des pesticides, un temps de questions-réponses a suivi et des idées supplémentaires ont été proposées comme la protection du fœtus, particulièrement vulnérable, et celle des enfants en priorité.
Chantal Jouanno a proposé de servir du pain biologique dans les cantines scolaires, ce qui est facile à faire et sans surcoût selon elle, et déjà testé dans certaines villes. Un autre élu a souhaité l’utilisation généralisée de silos à grain réfrigérés pour éviter l’aspersion de pesticide sur les grains stockés avant d’être moulus afin d’éviter le développement d’insectes.
Une question a été posée pour savoir s’il serait possible de ne produire que du lait biologique en France à terme, étant surtout consommé par les enfants, comme on l’a fait pour l’interdiction du bisphénol A dans les biberons en plastique.
Enfin, un des élus a indiqué que de plus en plus de villes et communes passent au zéro phyto « afin de ne pas prendre le risque d’être poursuivies en justice plus tard ». L’heure et demie n’a pas suffi pour faire le tour de la question et avant de partir, les élus ont signé la charte pour les alternatives aux pesticides, imprimée en grand format. Ils sont déjà une centaine à avoir signé. Il est possible pour les autres élus, députés, sénateurs ou maires de les rejoindre en signant la charte par internet (ici).
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Notes
(1) Enquête EXPPERT 1 Exposition aux Pesticides Perturbateurs Endocriniens. Génération Future, 19 mars 2013
(2) Brain tumours and exposure to pesticides : a case–control study in southwestern France, Dorothee Provost, Anne Cantagrel, Pierre Lebailly, Anne Jaffre, Veronique Loyant, Hugues Loiseau,Anne Vital, Patrick Brochard, Isabelle Baldi. Occup Environ Med 2007 ;64:509–514
(3) http://www.20minutes.fr/planete/1119025-20130315-medecins-limousin-alertent-dangers-pesticides
(4) http://www.france-libertes.org/IMG/pdf/carte_des_derogations_en_france.pdf
Source : Bonnes nouvelles environnementales
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