Les Français n’ont jamais été aussi inquiets du risque nucléaire

Le risque nucléaire enregistre un niveau d’inquiétude jamais atteint dans le baromètre annuel de l’IRSN sur la perception des risques. Pour autant, l’idée que toutes les précautions sont prises en France pour assurer un très bon niveau de sûreté est majoritaire. Mediapart 16 FÉVRIER 2012 | PAR JADE LINDGAARD

http://www.mediapart.fr/journal/france/150212/les-francais-n-ont-jamais-ete-aussi-inquiets-du-risque-nucleaire

16 FÉVRIER 2012 | PAR JADE LINDGAARD

Ce n’est pas l’usage sur Mediapart de commenter les enquêtes d’opinion. Nous avons même décidé de nous l’interdire concernant les candidats à l’élection présidentielle. Le « baromètre » sur la perception des risques et de la sécurité des Français que vient de publier l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) (à lire ici) contient cependant des informations notables concernant la perception du nucléaire après l’accident de Fukushima.

Commençons par préciser que l’IRSN sonde l’opinion nationale depuis la fin des années 1980. Les questions varient plus ou moins d’une année à l’autre mais restent en partie les mêmes depuis la fin des années 1990, ce qui permet d’instructives comparaisons dans le temps. Ainsi les inévitables biais causés par la formulation des questions, le moment d’interrogation des personnes sondées… sont en partie compensés par le fait que l’on peut comparer certaines réponses sur une douzaine d’années. Ce sont leurs évolutions dans le temps qui indiquent dans cette nouvelle étude, réalisée entre septembre et octobre 2011, des changements instructifs. 

D’abord, le risque nucléaire enregistre un niveau d’inquiétude jamais atteint depuis 2000, date de l’introduction de ce sujet : 18 % des personnes interrogées considèrent que c’est le risque le plus inquiétant parmi un certain nombre de problèmes (chômage, crise financière, misère…). Pour la première fois, il dépasse l’inquiétude liée à l’insécurité.  
De plus, les sondés n’ont jamais été aussi nombreux à considérer que le risque nucléaire est élevé : ils sont 55 % à l’exprimer en 2011, tandis qu’ils ne sont plus que 24 % à ressentir de la confiance vis-à-vis des centrales nucléaires, soit le niveau le plus bas depuis 1997. A 84 %, ils refuseraient de vivre à côté d’une centrale nucléaire (mais sont plus nombreux encore à refuser de vivre près d’un incinérateur de déchets ménagers). A la question : « Pensez-vous qu’un accident de même ampleur que Fukushima peut se produire en France », ils sont près de 70 % à répondre par oui.

"Considére-vous que les risques pour les Français sont quasi nuls, faibles, moyens, élevés ou très élevés?"
« Considére-vous que les risques pour les Français sont quasi nuls, faibles, moyens, élevés ou très élevés? »

En vert : « élevé » ; en gris : « moyen » ; en noir : « faible ».
Pour autant, ils restent plus nombreux à penser que toutes les précautions sont prises en France pour assurer un très bon niveau de sûreté des installations nucléaires (37 % contre 33 % qui pensent l’inverse). Mais l’écart entre les deux positions se réduit fortement par rapport à l’année dernière : ils étaient 40 % à le penser en 2010 contre 26 % qui s’y opposaient. Autre apport de cette enquête, l’indépendance énergétique (43 %) et le coût du kilowatt-heure sont pour les personnes interrogées les principales raisons d’être favorables au nucléaire. En réponse à cette question, la sûreté n’a jamais connu un si faible niveau (12 %). 

Ainsi, selon l’analyse de l’IRSN, il existe bien une trace du choc de Fukushima. Mais pour autant, les sondés maintiennent leur confiance dans leur système de sûreté. Ce rapport ambigu à la perception de leur propre risque face au nucléaire fournit peut-être un début d’explication à la faible popularité des discours anti-nucléaires à ce stade de la campagne électorale. Autre piste d’explication : l’adhésion de la majorité des personnes interrogées à l’argumentaire sur l’indépendance énergétique et le faible coût de l’électricité nucléaire, qui sont le plus mis en avant par les défenseurs de l’atome.

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