Fukushima : la justice japonaise condamne les antinucléaires et blanchit Tepco

La catastrophe de Fukushima continue de diviser le Japon, dans la sphère politique et, désormais, devant les tribunaux. Jeudi 12 septembre devait se tenir une nouvelle audience du procès intenté par l’Etat contre Toru Fuchigami et Taichi Masakiyo, deux responsables de Tento hiroba, la « place des tentes ». Ce campement est devenu le cœur du mouvement antinucléaire nippon depuis son installation le 11 septembre 2011, six mois exactement après le début de la catastrophe de Fukushima. LE MONDE  12.09.2013 Philippe Mesmer (Tokyo, correspondance)

Dressé au pied du ministère de l’économie, du commerce et de l’industrie (METI) – l’administration chargée de la politique nucléaire – le camp, des plus bigarrés, tranche avec les immeubles austères du quartier des ministères de Kasumigaseki, à Tokyo.

Son installation faisait suite à un été marqué par d’importants rassemblements antinucléaires dans tout le Japon. Pour les initiateurs du mouvement, le camp relève d’une action « morale », car le METI et le gouvernement auraient menti à la population pendant des décennies. « Ils n’ont pas cessé de nous dire que l’énergie nucléaire était sûre et propre et qu’il n’y avait pas à s’inquiéter d’un éventuel tremblement de terre », accuse Toru Fuchigami.

« OCCUPATION ILLÉGALE »

Après avoir longtemps tergiversé, le gouvernement a porté plainte le 29 mars pour « occupation illégale d’un espace public ». Il réclame 22 000 yens (167 euros) par journée d’occupation, plus les arriérés. Ce procès intervient alors que le parquet de Tokyo a décidé lundi 9 septembre de ne pas poursuivre les responsables politiques et les autorités du nucléaire au moment de la catastrophe de Fukushima. Les magistrats ont rejeté les plaintes déposées contre une quarantaine de personnalités, dont le chef de gouvernement Naoto Kan et plusieurs ministres, les dirigeants de Tepco Masataka Shimizu et Tsunehisa Katsumata et Haruki Madarame, ancien patron de la commission de la sûreté nucléaire.

Ils se voyaient reprocher une négligence dans la préparation des sites nucléaires aux risques sismiques et dans l’évacuation des populations menacées. Le parquet a rejeté ces accusations, estimant que Tepco, comme le gouvernement, ne pouvait pas prévoir de tels séismes et tsunami. Officiellement, la catastrophe nucléaire n’a fait aucune victime.

Le gouvernement continue de nier la gravité de la situation de la centrale et des fuites d’eau radioactive. Le 6 septembre à Buenos Aires, lors de la promotion de la candidature de Tokyo pour les Jeux olympiques de 2020, le premier ministre, Shinzo Abe, l’avait « garanti » : « La situation à la centrale est sous contrôle. » « Les propos de M. Abe m’ont abasourdi », a réagi Hiroaki Koide, chercheur en nucléaire à l’université de Kyoto, très critique vis-à-vis de la politique nippone de l’atome.

Le président de l’autorité nucléaire, Shunichi Tanaka, affiche la même sérénité que le premier ministre. « On ne peut pas nier que de l’eau contaminée fuit, mais il n’est pas nécessaire de s’inquiéter outre mesure des conséquences environnementales », a-t-il expliqué lors d’une conférence de presse, le 11 septembre. Selon les experts, les particules radioactives se déposent très vite sur les fonds marins. Mais la question de la diffusion par les poissons et autres organismes vivants reste posée. Un point qui inquiète les pêcheurs et qui a incité la Corée du Sud à interdire les importations de produits de la mer de huit départements de l’est du Japon.

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